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L’OEIL DU PHARE

vail au service de la volonté, qui s’aident pour être aidés du ciel. Dans la lutte de la vie comme à la guerre, fuir c’est trahir ; l’affaissement, c’est la défaite, et je m’étonne que l’élève d’un si bon vieux prêtre n’ait pas mieux retenu ses leçons rien moins que fatalistes. Mais tu l’as voulu fuir aussi celui-là.

— Que pouvais-je faire, moi à Saint-Germain, sans profession, sans métier, sans autres ressources que le travail du mercenaire, avec en plus ce que tu appelles mon orgueil de déclassé, qui existe tout de même et fait souffrir ?

— Tu pouvais faire face à l’avenir et non pas fuir ; poursuivre une destinée nouvelle comme a fait mon père. Lui aussi a dû un jour renoncer à la terre canadienne qui lui était devenue ingrate. Il ne connaissait des aciéries que le fer de ses voitures et de ses grotesques outils de laboureur. Ce qui l’a conduit à la fortune, ce n’est pas d’avoir fui au-delà des mers, mais d’avoir su changer sa destinée qui le trompait comme la tienne. Car la Providence, ce qui