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CHAP. IV. — TOULOUSE

depuis huit ou dix mois dans cette ville où il passait déjà pour un étudiant plein de promesses, lorsqu’il demanda à Bording de parler de lui à Jean de Pins ; et, comme son camarade lui laissa entendre que l’évêque l’accueillerait favorablement, Dolet écrivit au prélat une lettre emphatique, pleine de constructions contournées et de lambeaux de phrases empruntées à Cicéron, dans laquelle il a l’air de vouloir dire le moins possible (les compliments et les excuses exceptés) en beaucoup de mots et dans ce style pompeux dont les cicéroniens de l’époque aimaient à se servir. Toutefois cette épitre est une imitation assez heureuse de certaines des lettres de Cicéron plus remplies de mots que desubstance. Il dit à l’évéque l’admiration qu’il lui inspire, il lui parle de son désir de le connaître et d’acquérir son amitié. « Tout ce que je vous demande, c’est de ne pas me tenir rigueur si je vous exprime l’admiration que j’ai pour cette réputation fermement établie et universellement connue dont les premières fleurs ont eu Longueuil pour témoin et pour panégyriste. Il n’est rien que je désire tant que de vous voir être pour moi ce que Bembo fut pour Longueuil, c’est-à-dire le soutien de mes études, le défenseur et le promoteur de la réputation que j’espère acquérir, mais que je n’ignore pas ne point posséder encore. »

L’évêque ne tarda pas à répondre à cette épitre, puis il fit connaître à Bording quelles étaient ses intentions ; ce dernier raconte le succès de sa démarche dans une lettre qu’il adresse à Dolet :

« J’ai pris soin de faire ce que vous m’avez demandé dernièrement ; je me suis chargé de saluer Jean de Pins en votre nom et je lui ai demandé de vous accueillir avec bienveillance, mais vous êtes arrivé au but vous-même, grâce à votre lettre qui révélait tant de talent, tant de savoir et d’élégance de style, qu’elle a rendu toutes mes louanges inutiles. Quoi qu’il en soit, j’ai fait ce que j’ai pu, et c’est avec plaisir que je renouvellerai mes démarches. La faveur de Jean de Pins vous