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ÉTIENNE DOLET

homme de lettres, augmenté même par ses gages de lecteur ou de correcteur, suffisait à ses faibles besoins, mais ne pouvait subvenir à l’entretien de femme et enfants. Ce fut le 6 mars 1538, alors qu’il eut une entrevue à Moulins avec le roi[1]et qu’il lui offrit un exemplaire de ses Commentaires qu’il obtint de François l’autorisation « d’imprimer ou faire imprimer tous les livres par luy composés et traduicts, et touts aultres œuvres des aulteurs modernes et antiques qui par lui seront deuement veus, amendés, illustrés, ou annotés, soit par forme d’interprétation, scholies, ou aultre déclaration : tout en lettres latines, grecques, italiennes et françoyses. »

Par ce privilège il est défendu à toute autre personne, sous peine d’amende et de confiscation, d’imprimer ou de mettre en vente, soit dans le royaume de France ou ailleurs, des livres copiés sur ceux de Dolet, et cela pendant l’espace de dix ans, à dater de la publication respective desdits livres. Le document se termine par ces mots : «Par le Roy. Monseigneur le cardinal de Tournon présent.» Il est signé, De la Chesnaye, et scellé du grand sceau « en cire jaulne ».

Il se passa encore quelque temps avant que Dolet pût profiter de ce privilège et terminer les préparatifs nécessaires pour s’établir comme imprimeur. Toutefois, avant la fin de l’année 1538, ses presses furent installées, et un livre au moins fut imprimé par lui. Son ancien ami Gryphius, loin d’être jaloux de son jeune rival, lui rendit tous les services qu’il lui demanda. Quand on examine soigneusement les livres sur lesquels figure le nom de Dolet en qualité d’imprimeur, on est porté à croire que plus d’un de ces volumes fut imprimé par Gryphius, et l’on voit clairement que plusieurs des lettres initiales gravées sur bois, employées par ce dernier, avaient été prêtées ou données par lui à Dolet, puisqu’elles sont iden-

  1. Le privilège est daté du 6 mars 1537, c’est-à-dire 1538, nouveau style. On a la certitude de ce fait par les mots qui terminent le document (et de notre Règne le vingt-quatrième). François Ier monta sur le trône le premier janvier 1515. La vingt-quatrième année de son règne commencerait donc au premier janvier 1538.