Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/187

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contrat, lorsque les parties se sont liées par des contrats ou par des conventions. Les contrats sont des traités dont les lois garantissent l’exécution ; ainsi : « S’il y a contrat, qu’on plaide à l’endroit convenu ; s’il n’y a pas contrat, qu’on porte la cause aux comices ou au forum avant midi. » Les conventions sont des traités dans lesquels les lois n’interviennent pas, mais qui s’exécutent de droit. Voilà donc par quels moyens on peut démontrer les torts d’un adversaire, et appuyer son droit ; voilà comment il faut procéder dans la question judiciaire absolue.

XIV. Quand on emploiera l’alternative pour savoir s’il valait mieux agir comme l’accusé déclare l’avoir fait, ou comme l’accusateur prétend qu’il aurait fallu le faire, il convient de rechercher d’abord lequel des deux partis aurait été le plus utile ; c’est-à-dire, le plus honorable, le plus facile, le plus avantageux. Il faudra demander ensuite si c’était l’accusé qui devait juger lui-même du degré d’utilité, ou s’il appartenait à d’autres de le fixer. Alors l’accusateur, procédant comme dans la question conjecturale, fera naître le soupçon que si l’accusé s’est conduit ainsi, ce n’était pas pour préférer le meilleur au pire, mais par fraude et par mauvaise foi. Ne pouvait-on pas éviter, demandera-t-il, de venir dans ce lieu ? Le défenseur, au contraire, réfutera l’argumentation conjecturale par quelqu’une des raisons probables dont nous avons déjà parlé. Ces moyens employés, l’accusateur attaquera, par un lieu commun, celui qui préfère à l’utile ce qui ne l’est pas, lorsqu’il n’avait pas le pouvoir de choisir. Le défenseur répliquera par un lieu commun, en forme de plainte, contre ceux qui pensent qu’il est juste de préférer une chose pernicieuse à une chose utile ; et il demandera en même temps aux accusateurs et aux juges eux-mêmes ce qu’ils auraient fait s’ils avaient été à la place de l’accusé ; et il leur mettra sous les yeux le temps, le lieu, la chose et les motifs qui l’ont fait agir.

XV. Il y a récrimination, lorsque l’accusé motive sa faute sur celle que d’autres ont commise. Il faut, dans ce cas, examiner d’abord si ce moyen peut être légitimement admis ; en second lieu, si le délit que l’accusé rejette sur un autre est aussi grave que celui dont il se reconnaît coupable ; ensuite s’il y avait nécessité pour lui de commettre une faute dont un autre lui avait donné l’exemple. Ne fallait-il pas qu’un jugement eût été prononcé auparavant ? et en l’absence d’un jugement sur cette action qu’il impute à un autre, devait-il en porter un lui-même sur une question qui n’avait point encore été décidée par les tribunaux ? Ici viendra un lieu commun de l’accusateur contre ceux qui s’imaginent que la violence doit l’emporter sur les jugements : il demandera à ses adversaires ce qui arriverait si d’autres se conduisant comme eux, et d’après l’exemple qu’ils conviennent d’en avoir donné, infligeaient le supplice avant que la condamnation eût été portée ; que serait-ce si l’accusateur lui-même en avait voulu faire autant ? Le défenseur dévoilera toute l’atrocité de ceux sur lesquels on rejette la responsabilité du crime : il mettra sous les yeux le fait, le lieu, le temps, de manière à faire croire à ceux qui l’entendront, qu’il était impossible ou qu’il n’était pas utile de juger l’affaire.

XVI. Par l’aveu, nous demandons qu’on nous pardonne. Il est de deux sortes ; la défense du motif, et la déprécation. Dans le premier cas, nous nions avoir agi de dessein prémédité, nous nous en prenons à la nécessité, au hasard, à l’ignorance.