Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/331

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Maintenant expliquons ce qui constitue l’honneur.

LIII. Nous appellerons honnête, ce qu’en tout ou en partie on recherche pour soi-même. On divise en deux classes ce qui concerne l’honnêteté de nos actions : l’une embrasse seulement l’honnêteté ; et l’autre, l’honnêteté et l’utilité. Occupons-nous d’abord de la première. La vertu, sous un seul mot et sous une seule nature, comprend tout ce qui a rapport à l’honnêteté ; car la vertu est une disposition naturelle de l’âme, conforme à la raison. Si donc nous connaissons la vertu dans toutes ses parties, nous aurons une définition complète de ce seul mot, honnêteté. La vertu a quatre parties : la prudence, la justice, la force, et la tempérance. La prudence est la connaissance du bien et du mal, et de ce qui n’est ni l’un ni l’autre. Elle se compose de la mémoire, de l’intelligence, et de la prévoyance. Par la mémoire, l’âme se rappelle le passé ; l’intelligence examine le présent ; la prévoyance lit dans l’avenir. La justice est une disposition de l’âme, qui, sans blesser l’intérêt général, rend à chacun ce qui lui est dû. Elle a sa source dans la nature ; ensuite l’utilité a fait de certaines choses autant de coutumes ; enfin la crainte des lois et la religion ont sanctionné l’ouvrage de la nature, confirmé par l’habitude.

Le droit naturel n’est point fondé sur l’opinion ; nous le trouvons gravé dans nos cœurs, comme la religion, la piété, la reconnaissance, la vengeance, le respect et la vérité. La religion nous enseigne à consacrer un hommage et un culte à une nature suprême, qu’on appelle divine. La piété est l’exact accomplissement de nos devoirs envers nos parents et les bienfaiteurs de notre patrie. La reconnaissance est le souvenir de l’attachement et de l’affection d’un autre, et le désir de lui rendre service pour service. La vengeance repousse et punit la violence, l’injustice et tout ce qui peut nous nuire. Le respect consiste dans les marques de déférence qu’on témoigne aux hommes supérieurs en mérite et en dignité. La vérité est le récit et comme l’image fidèle du présent, du passé ou de l’avenir.

LIV. Le droit fondé sur la coutume consiste, ou dans le développement et la force que l’usage donne à des notions naturelles, comme à la religion, ou dans les choses que nous inspire la nature, confirmées par l’habitude, et que le temps et l’approbation du peuple ont changées en coutumes, comme un contrat, l’équité, un jugement antérieur. Un contrat est un traité entre deux ou plusieurs individus. L’équité donne un droit égal à tous. Un jugement antérieur est la décision déjà rendue par une ou plusieurs personnes. Le droit civil est renfermé dans ces lois écrites, qu’on ex-pose à la vue du peuple, pour qu’il s’y conforme.

La force brave les dangers et soutient les travaux, dont elle connaît l’étendue. Elle comprend la grandeur, la fermeté, la patience, la persévérance. La grandeur exécute avec éclat les nobles et vastes projets qu’elle a formés pour atteindre le but élevé que s’est proposé son ambition. La fermeté est une juste confiance de l’âme en elle-même, dans l’exécution de projets grands et honorables. La patience supporte volontairement de longs et pénibles travaux, pour arriver à un but utile et honnête. La persévérance persiste dans le parti qu’elle a embrassé après de mûres réflexions.