matière infinie, et qui exigent une ardeur médiocre dans une étude dont on ne connaît jamais mieux le prix que quand on la pousse le plus loin possible.
En effet, si l’on peut parvenir à la véritable sagesse, il ne suffit pas de l’avoir acquise, il faut en jouir. Si l’acquisition en est longue et pénible, on ne doit pas cesser de chercher le vrai, qu’on ne l’ait trouvé ; et il serait honteux de manquer de persévérance et de courage dans ses poursuites, quand on a pour but la suprême beauté. Si la philosophie est un sujet sur lequel je prenne plaisir à écrire, pourquoi m’envier un plaisir honnête ? Et si c’est une tâche que je me suis faite, pourquoi m’empêcher de m’exercer l’esprit ? On peut pardonner aux intentions bienveillantes du Chrémès de Térence[1], qui ne veut pas que son nouveau voisin
Fouille le sol, laboure et porte des fardeaux ;
il ne veut que lui épargner un travail fatigant et pénible ; mais il n’en est pas ainsi de ces amis indiscrets, qui prétendent me détourner d’un travail plein de charmes pour moi.
CHAPITRE II
Préambule (suite).
Il n’est pas peut-être si aisé de bien répondre à ceux qui ne font nul cas de ce qu’on traduit dans notre langue[2], quoiqu’on ait sujet de s’étonner que des gens qui ne laissent pas de prendre plaisir à des tragédies latines, traduites du grec mot pour mot, ne puissent pas souffrir la langue de la patrie dans le développement des sujets les plus graves[3].