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VII

visés n’était que de la poésie chantante ou récitative, sur les beautés de la nature, sur les exploits de leurs ancêtres, sur les événemens mémorables arrivés dans leur pays, et sur d’autres sujets propres à exalter l’imagination.

Les prêtres ou les vieillards, en grec πρεσβύτεροι, furent ceux qui, après les poètes, contribuèrent le plus à polir le langage ; ils étaient seuls en possession de transmettre ou de raconter en prose les faits les plus remarquables de leur temps, de dicter à la jeunesse des règles de morale et de vertu, de prononcer comme juges sur les peines à infliger aux crimes, sur les récompenses à donner aux belles actions ; et comme pour se faire écouter, ils durent s’appliquer à parler correctement, à n’employer que des termes choisis, leur éloquence en acquit plus de poids ; les charmes de l’élocution adoucirent ce qu’il y eut de rude, de sévère dans leurs discours qu’on retint plus facilement. On ne se borna pas à les apprendre, à les réciter par cœur ; on voulut encore les imiter, les surpasser même, et ces efforts continuels tournèrent au profit de l’art de parler.

Dans ces temps reculés le pouvoir suprême résidait entre les mains des généraux d’armée et des chefs de tribus. Les harangues de ces chefs, destinées à frapper les esprits, à remuer les cœurs, à produite de grands effets, ont dû être composées avec soin dans un style plus orné, plus pur que celui des simples conversations. On les étudia ; elles servirent de modèles à tous ceux qui eurent besoin de se faire entendre, ou qui visèrent au talent de bien parler.