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Page:Clar - Les Jacques, 1923.djvu/128

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LES JACQUES

blesse ignorante et brutale n’est point le guide avisé qu’il faut à des ouailles poussées à la révolte par des meneurs habiles qui sauront pêcher en eau trouble.

— Qui nommez-vous ainsi, abbé Jérôme ?

— Qui je nomme ? Quelques bourgeois dont ce prévôt des marchands, cet Étienne Marcel qui, d’un appui secret soutient les émissaires d’un Guillaume Karlot devenu un souverain de dérision, mais qui agite les campagnes en tous sens. Le feu peut couver longtemps, une étincelle fera tout flamber.

L’abbé Denis ne riait plus.

— Qui vous donna de tels renseignements ?

— J’ai, moi aussi, mes émissaires.

— Que pense notre vénéré prieur de tout ceci ?

— Il demeure incrédule, se butant dans la croyance du droit de la noblesse à tailler dans le vilain.

— Vous voyez bien, abbé Jérôme, s’écria l’abbé Denis reprenant quelque vaillance.

— Et moi, je vous affirme que j’ai raison. Je vous préviens que nous assisterons à de terribles spectacles, et qu’il sera trop tard !

L’accent était d’une telle véhémence que perdant tout à coup son optimisme souriant, l’abbé Denis fut étreint d’une véritable terreur.

— Vous êtes effrayant, balbutia-t-il. Mais en admettant qu’il se passe de telles abominations entre les seigneurs et leurs vassaux, qu’aurions-nous à voir là-dedans ?

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