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Page:Clar - Les Jacques, 1923.djvu/135

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LES JACQUES

robe de l’ange, ses ailes étendues, ses cheveux bouclant autour de la figure ronde dont les joues se gonflaient à souffler dans une longue trompette. Et le tailleur de pierres prétendait sceller sans nulle aide la statue au faîte de la cathédrale.

Le soleil couchant enveloppait la ville d’un somptueux linceul quand Philippe de Haume, fermant l’atelier, sortit avec ses trois élèves. Les marchands envoyaient dans la rue leurs apprentis solliciter un chaland attardé qui cédait à leur invite. Des écoles, sortaient des bandes bruissantes d’étudiants dont les plus aisés se régalaient de galettes achetées au vendeur d’oublies. Les peu fortunés détournaient les yeux, sentant leurs entrailles crier famine, et ne sachant, non seulement comment imposer silence à la fringale, mais fréquemment en quel lieu coucher. L’un citait à l’autre un auvent sous lequel on dormait à l’abri. Plus loin une rixe éclatait entre deux laïcs et un ecclésiastique et ce dernier rendait avec usure les coups qu’il recevait, sans que ni les uns ni l’autre aient songé à faire intervenir la maréchaussée. À la porte d’une hostellerie, un homme arrêtait ceux qu’il supposait des voyageurs, pour leur vanter l’honnêteté des prix et le confortable du manger et du boire. Plus loin, des apprentis s’égayaient à lancer un chat noir dans un brasier de bûchettes qu’ils avaient allumé, pour voir si l’animal terrifié et miaulant n’incarnait point Belzébuth. Des bourgeois flânaient un instant

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