Page:Claude Farrère - Les civilisés, 1905.djvu/177

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Fierce ne bougea pas.

« … De Mlle Abel aussi. »

Fierce se moqua :

— « Tu peux nommer toute la terre… »

Il avait eu peur d’un autre nom, pourtant. Il ne se l’avoua pas à lui-même.

— « Cinq heures, dit-il ; adieu.

— Où vas-tu ? fit Mévil.

— Au tennis. »

Mévil se leva.

— « Emmène-moi.

— Ah ! non ! »

Il n’aurait pas su dire pourquoi, mais Mévil lui semblait être la dernière personne à présenter aux gens qu’il allait voir.

— « Pourquoi non ? dit Torral. Allez ensemble. Mévil connaît tout Saïgon : ce n’est pas une présentation. Ça lui fera du bien d’aller là, — et à toi de l’y voir… »

Fierce hochait la tête. Torral le persuada d’une citation ironique :

« La jalousie, monsieur ? d’abord un bruit léger…

— Imbécile ! » fit l’autre ; et il consentit. Mévil s’habilla plus vite qu’il n’avait coutume. Torral les accompagna jusqu’au coin de la rue d’Espagne.

— « Ici, dit-il, nos routes bifurquent. »

Il regarda Fierce.

« … Bifurquent même plus que ça n’en a l’air ! Par là, route des sottises ; — par ici, route de la raison. »