Page:Claude Farrère - Les civilisés, 1905.djvu/137

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Mais Malais haussait les épaules.

— « Mon cher, pas d’indignation inutile ! vous allez faire rire Fernande. La discrétion est de trop ici… »

Fierce songea à Mévil, et prit le parti de ne pas nier.

— « Diable d’homme ! Comment savez-vous ?

— Parce que vous êtes le vingtième à qui l’aventure arrive. »

Malais s’était assis, après un coup d’œil à sa montre. Sans doute avait-il le temps ; il causa.

— « Le vingtième. Ah ! vous entrez dans une famille typique. De vieilles connaissances à moi : j’ai rencontré les Ariette à Nouméa, il y a huit ans. Ils étaient nouveaux mariés, et leur lune de miel était rousse : ils ne s’appréciaient pas, faute de se connaître, mais bientôt ils se sont connus…

« La femme était aussi jolie qu’aujourd’hui. Quelqu’un en savait quelque chose, et ce quelqu’un était un fils d’archevêque, convenablement riche, — un de vos camarades, le lieutenant de vaisseau qui commandait le stationnaire de Calédonie. Il arriva ce qui arrive toujours : un beau soir, Ariette calcula son temps, et les surprit en pleins ébats. En homme de tact, il ne fit pas de tapage : il accepta cinquante mille francs pour n’en pas faire.

— Il paya, le fils d’archevêque ?

Mme Ariette le fit payer. Vous devez connaître sa méthode, je suppose ?

— Et par la suite ?

— Par la suite, un traité fut conclu entre les époux : Toutes liaisons sont permises de part et d’autre, sous