Page:Claude Farrère - Les civilisés, 1905.djvu/327

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accords farouches qui vibrent longuement au-dessus du tumulte des sons.

Les obus tapent partout. C’est la fête féroce du feu et de l’acier. Le pont du 412 qui sombre n’est plus qu’un décombre rouge, où des lambeaux de chair huilés de sang commencent à frire dans la flamme.

— Or, à la fanfare insolente et triomphale des canons se mêle un coup mat, funèbre comme la première pelletée de terre jetée sur un cercueil. Une gerbe d’eau jaillit au flanc du cuirassé ; — et puis plus rien. Mais, comme si quelque foudre inouïe pulvérisait les canonniers sur leurs pièces, les canons, tous ensemble, se taisent, bâillonnés.

Et dans le silence soudain, une immense clameur d’agonie s’élance du cuirassé frappé à son tour, et monte dans la nuit, — épouvantable.