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LE RIZ


C’est la dent que nous mettons à la terre même avec le fer que nous y plantons, et déjà notre pain y mange à la façon dont nous allons le manger. Le soleil chez nous dans le froid Nord, qu’il mette la main à la pâte ; c’est lui qui mûrit notre champ, comme c’est le feu tout à nu qui cuit notre galette et qui rôtit notre viande. Nous ouvrons d’un soc fort dans la terre solide la raie où naît la croûte que nous coupons de notre couteau et que nous broyons entre nos mâchoires.

Mais ici le soleil ne sert pas seulement à chauffer le ciel domestique comme un four plein de sa braise : il faut des précautions avec lui. Dès que l’an commence, voici l’eau, voici les menstrues de la terre vierge. Ces vastes campagnes sans pente, mal séparées de la mer qu’elles continuent et que la pluie imbibe sans s’écouler, se réfugient, dès qu’elles ont conçu, sous la nappe durante qu’elles fixent en mille cadres.