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vii
préface

qui, pendant le cours de toute une année — où sont relatés jusqu’aux moindres détails de son existence — ne fait pas mention de prières une seule fois. Imperturbable, elle recense les scènes les plus scabreuses avec une narquoiserie amusée, de même que les bourdes lâchées par une condisciple étourdie, et sans plus d’émoi. Car elle ne met jamais au point : comme les bambins ignorants de la perspective déclarent la Tour Eiffel, aperçue dans le lointain, « joliment plus petite que la maison de papa » — quitte à reconnaître quand on la leur montre de près : « elle a joliment grandi depuis l’autre jour », — Claudine ne soupçonne pas l’importance relative des sensations qui successivement sollicitent son âme non formée, son cœur non averti. Elle note tout sur le même plan : ses angoisses suscitées par l’extraction douloureuse d’une racine carrée et son chagrin rageur lors de l’ukase directorial supprimant les leçons particulières — très particulières en effet — dispensées par la plus jolie institutrice de l’École où elle s’instruit, prodigieusement ; toute joyeuse et fière de constater la déconvenue penaude d’un instituteur-adjoint, Don Juan de l’enseignement primaire, qu’elle a drôlement berné, son allégresse éclate non moins