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CLAUDINE À L’ÉCOLE

mandent un terrain maigre et pierreux », nous enseigne l’ineffable Bérillon ; ça fera bien l’affaire, hein, Anaïs ? De la chicorée, des choux, c’est pas une robe, c’est un potager.

Mlle Claudine, si vous venez ici pour dire des choses aussi spirituelles, vous pouviez rester sur votre sable, on n’attendait pas après vous !

— Ne t’échauffe pas ; dis-nous comment est faite la jupe, de quels légumes on l’assaisonnera ? Je la vois d’ici, il y a une frange de persil autour !

Luce s’amuse de tout son cœur, Anaïs se drape dans sa dignité et s’en va ; comme le soleil baisse, nous nous levons aussi.

À l’instant où nous fermons la barrière du jardin, des rires clairs jaillissent, se rapprochent, et Mlle Aimée passe, courant, pouffant, poursuivie par l’étonnant Rabastens qui la bombarde de fleurs de glycines égrenées. Cette inauguration ministérielle autorise d’aimables libertés dans les rues, et à l’École aussi, paraît-il ! Mais Mlle Sergent vient derrière, pâlissante de jalousie et les sourcils froncés ; plus loin nous l’entendons appeler :

« Mlle Lanthenay, je vous ai demandé deux fois si vous aviez donné rendez-vous à vos élèves pour sept heures et demie ». Mais l’autre folle, ravie de jouer avec un homme et d’irriter son amie, court sans s’arrêter et les fleurs de glycine s’accrochent à ses cheveux, glissent dans sa robe… Il y aura une scène ce soir.

À cinq heures, ces demoiselles nous rassem-