Page:Claudine a l'Ecole.pdf/336

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champêtre lui taperait sur le ventre, en lui demandant un bureau de tabac pour sa bru qui a trois enfants, la pauv’fille, et pas de mari.

Mademoiselle nous masse sur le côté droit de l’estrade, car le ministre et ses comparses vont s’asseoir sur ce rang de sièges, pour nous mieux entendre chanter. Ces messieurs s’installent ; Dutertre, couleur cuir de Russie, rit et parle trop haut, ivre, comme par hasard. Mademoiselle nous menace tout bas de châtiments effroyables si nous chantons faux, et allons-y de l’Hymne à la Nature !

Déjà l’horizon se colore
Des plus éclatantes lueurs ;
Allons, debout ; voici l’aurore !
Et le travail veut nos sueurs !

(S’il ne se contente pas des sueurs du cortège officiel, le travail, c’est qu’il est exigeant.)

Les petites voix se perdent un peu en plein air ; je m’évertue à surveiller à la fois la « seconde » et la « troisième ». M. Jean Dupuy suit vaguement la mesure en dodelinant de la tête, il a sommeil, il rêve au Petit Parisien. Des applaudissements convaincus le réveillent ; il se lève, s’avance et complimente gauchement Mlle Sergent qui devient aussitôt farouche, regarde à terre et rentre dans sa coquille… Drôle de femme !

On nous déloge, on nous remplace par les élèves de l’école des garçons, qui viennent braire un chœur imbécile :