Page:Claudine a l'Ecole.pdf/68

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
48
claudine à l’école

rentrée, je m’essouffle et je galope, poursuivie et poursuivante, me retenant de penser le plus que je peux.

Pendant la partie, j’ai aperçu la tête de Rabastens ; il regarde par dessus le mur et prend plaisir à voir courir ces grandes filles qui montrent, inconsciemment les unes, comme Marie Belhomme, et très sciemment d’autres, comme la grande Anaïs, des mollets jolis ou ridicules. L’aimable Antonin me dédie un gracieux sourire, extrêmement gracieux ; je ne crois pas devoir y répondre à cause de mes camarades, mais je cambre ma taille et je secoue mes boucles. Il faut bien amuser ce garçon. (D’ailleurs, il me semble né gaffeur et metteur de pieds dans tous les plats.) Anaïs qui l’a, elle aussi, aperçu, court en donnant des coups de genoux dans ses jupes pour faire voir des jambes, pourtant sans attraits, et rit, et pousse des cris d’oiseau. Elle ferait de la coquetterie devant un bœuf de labour.

Nous rentrons et nous ouvrons nos cahiers, encore essoufflées. Mais, au bout d’un quart d’heure, la mère Sergent vient prévenir sa fille, en un patois sauvage, que deux pensionnaires arrivent. La classe ébullitionne ; deux « nouvelles » à taquiner ! Et Mademoiselle sort en priant, à voix douce, Mlle Lanthenay de garder la classe. Aimée arrive, je cherche ses yeux pour lui sourire de toute ma tendresse anxieuse, mais elle me rend un regard assez mal assuré, et mon cœur se gonfle