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claudine à l’école

Tout animée, elle voudrait des détails, mais je me sauve.

Tâchons de penser aux leçons de solfège du séduisant Antonin Rabastens. Elles commencent jeudi ; je mettrai ma jupe bleue, avec la blouse à plis qui dessine ma taille, et mon tablier, pas le grand tablier noir de tous les jours à corsage ajusté (qui me va pourtant bien), mais le joli petit bleu clair, brodé, celui des dimanches à la maison. Et c’est tout ; pas trop de frais pour ce monsieur, mes bonnes petites camarades s’en apercevraient.

Aimée, Aimée ! C’est vraiment dommage qu’elle se soit enfuie si vite, cette jolie oiselle qui m’aurait consolée de toutes ces oies ! Maintenant je sens bien que la dernière leçon ne servira à rien du tout. Avec une petite nature comme la sienne, délicate, égoïste, et qui aime son plaisir en ménageant son intérêt, inutile de lutter contre Mlle Sergent. J’espère seulement que cette grosse déception ne m’attristera pas longtemps.

Aujourd’hui en récréation, je joue éperdument pour me secouer et me réchauffer. Anaïs et moi, tenant solidement Marie Belhomme par ses « mains de sage-femme », nous la faisons courir à perdre haleine jusqu’à ce qu’elle demande grâce ; ensuite, sous peine d’être enfermée dans les cabinets, je la condamne à réciter, à haute et intelligible voix, le récit de Théramène.