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les forces armées.

dans le choix de l’emplacement du front de bandière, que les cas sont nombreux dans lesquels le camp tournait précisément le dos à cette direction. Cette manière d’agir, si contraire à toutes les idées reçues aujourd’hui, ne peut s’expliquer qu’en ce que l’établissement des troupes dans les camps constituait alors une situation absolument en dehors de l’état de guerre proprement dit, une sorte de rentrée dans les coulisses, et que par suite la condition principale, ou pour mieux dire unique, que l’on demandât à un camp était d’offrir la plus grande somme possible de commodité générale. Appuyer invariablement les derrières du camp à un obstacle de terrain ne pouvait tout au plus passer pour une mesure de sûreté qu’en raison même de la manière spéciale dont on conduisait la guerre, et cette précaution est d’ailleurs si restreinte, qu’on ne peut pas supposer qu’en la prenant on songeât vraiment à la possibilité d’être attaqué dans cette situation. Dans le fait la chose était peu à craindre car le combat constituait alors une sorte de duel qui ne se produisait qu’en raison d’une entente commune et pour lequel on se donnait un rendez-vous commode. Les armées étaient hors d’état de combattre indifféremment sur toutes les espèces de terrain, partie en raison de la lourdeur de leur ordre de bataille, partie à cause de leur nombreuse cavalerie, car celle-ci bien que déjà au déclin de sa gloire était encore regardée, surtout chez les Français, comme l’arme principale. Il suffisait donc, en quelque sorte, de se placer sur un terrain coupé pour y trouver un abri aussi sûr que dans une contrée neutre, et comme d’ailleurs on ne savait guère tirer parti de ce genre de terrain, on préférait l’abandonner et se porter à la rencontre de l’ennemi lorsque celui-ci s’avançait pour offrir la bataille. Nous n’ignorons certainement pas que c’est dans un tout