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les forces armées.

rieure en nombre, mais supérieure à son adversaire par la force de son instruction et l’esprit de décision de son commandement, adopte pour système la grande promptitude dans les mouvements, et la concentration constante dans l’action. Éloigner cette armée de la proximité de l’ennemi, la couvrir par toute une ligne de postes avancés, serait paralyser la force qu’elle peut et doit tirer de ces deux grands éléments de supériorité. Que des exagérations et des fautes commises puissent mener parfois à un désastre comme celui d’Hochkirch, cela ne prouve rien, en somme, contre le système lui-même, et nous trouvons que c’est précisément à ce fait qu’il ne s’est présenté qu’une seule bataille d’Hochkirch dans l’ensemble des guerres de Silésie, qu’il convient de reconnaître la main du maître qui y conduisit les opérations.

Bonaparte qui ne manquait pas non plus d’une grande décision de caractère, et dont les troupes étaient tout aussi manœuvrières et mobiles que celles que commandait, quarante ans auparavant, Frédéric II, couvrait presque toujours la marche de son armée par une forte avant-garde. Il y avait deux raisons pour que Bonaparte agit ainsi à l’opposé de Frédéric II.

Tout d’abord de grands changements s’étaient introduits dans la tactique. On ne conduisait déjà plus une armée tout d’une pièce sur le champ de bataille comme une masse concentrée et indivisible manœuvrant directement sous le commandement et, pour ainsi dire, à la voix de son chef. Le gain de la bataille n’était donc plus le résultat d’une sorte de duel dans lequel on déployait plus ou moins d’adresse et de courage. On en était arrivé à tirer un tout autre parti des circonstances particulières et de la conformation du terrain. Dès lors la bataille ne consistait plus en une action unique, mais se subdivisait, dans son ensemble, en un nombre plus