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chap. iii. — attaque et défense stratégiques.
également, et d’attaqué celui-ci devient attaquant.


Il est à remarquer que ce changement des rôles est tout à l’avantage de l’ancien défenseur et au détriment du nouveau. Le premier, en effet, prend l’offensive sur son propre territoire avec l’intégralité de ses forces ; tandis que le second n’adopte la forme défensive que dans les conditions où ce mode d’action perd précisément tout ce qui en fait la puissance, c’est-à-dire en pays ennemi, affaibli par tous les détachements qu’il a dû laisser sur ses derrières, et avec des lignes de communications que leur étendue expose à tous les dangers et à toutes les surprises. L’aptitude aux manœuvres enveloppantes qui caractérise exclusivement l’offensive passe donc à l’ancien défenseur devenu à son tour attaquant. Or, entre ses mains, ce moyen prend une puissance que nous étions obligé de lui refuser tout à l’heure, car désormais, et précisément cette fois en raison de la grandeur des espaces stratégiques, la longueur et la faiblesse des lignes de communications de l’ancienne attaque les exposent de la façon la plus sérieuse à tous les mouvements tournants de l’ancien défenseur.

La coopération du théâtre de guerre est naturellement toute en faveur de la défense. Dès le début d’une campagne, en effet, l’attaque abandonnant son territoire se dirige sur celui qu’elle convoite. Plus la distance qu’elle a ainsi à parcourir est grande et plus elle s’éloigne de ses places fortes, de ses magasins et de ses dépôts de toute nature, s’affaiblissant en outre chaque jour davantage par les marches ainsi que par les détachements qu’elle est obligée de laisser sur ses derrières. La défense, au contraire, attend chez elle l’apparition de l’ennemi, elle demeure en possession de tous ses