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DU CAPITAINE COIGNET.

armes. Tout notre temps se trouvait employé ; dans trois mois, nos compagnies pouvaient manœuvrer devant le premier Consul.

Je devins très fort dans les armes ; j’étais souple, j’avais deux bons maîtres d’armes qui me poussèrent. Ils m’avaient tâté et ils avaient senti ma ceinture[1] ; ils me faisaient la cour. Je leur payais la goutte (il fallait cela à ces deux ivrognes). Je n’eus pas lieu de m’en plaindre, car, au bout de deux mois, ils me mirent à une forte épreuve ; ils me firent chercher une querelle, et je puis dire sans sujet : « Allons ! me dit ce crâne, prends ton sabre ! Et que je te tire une petite goutte de sang ! — Eh bien ! voyons, monsieur le faquin. — Prends un témoin. — Je n’en ai pas. » Et mon vieux maître, qui était du complot, me dit : « Veux-tu que je sois ton témoin ? — Je le veux bien, mon père Palbrois. — En route ! dit-il, pas tant de raisons ! »

Et nous voilà partis tous les quatre : nous ne fûmes pas loin dans le jardin du Luxembourg, il s’y trouvait de vieilles masures, et ils me mènent entre des vieux murs. Là, habit bas, je me mets en garde. « Eh bien ! attaque le premier, lui dis-je. — Non, me dit-il. : — Eh bien ! en garde ! »

Je fonce sur lui ; je ne lui donnais pas le temps de se reconnaître. Voilà mon maître qui

  1. L’argent se plaçait sur les hanches et sous la chemise, dans une ceinture de cuir.