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DU CAPITAINE COIGNET.

est parti. » — Eh bien ! je vais prendre le commandement de la division. »

Et il prit de suite la compagnie de grenadiers dont je faisais partie, et nous mena pour l’attaque, sur un rang. Nous commençâmes le feu. « Ne vous arrêtez pas en chargeant vos armes, dit-il. Je vous ferai rentrer par un rappel. »

Et il court rejoindre sa division. Il ne fut pas sitôt à son poste que la colonne des Autrichiens débusque de derrière des saules, se déploie devant nous, fait un feu de bataillon, et nous crible de mitraille. Notre petit général répond, et nous voilà entre deux feux, sacrifiés.

Je cours derrière un gros saule ; je m’appuie contre et tirai dans cette colonne, mais je ne pus y tenir… Les balles venaient de toutes parts, et je fus contraint de me coucher la tête par terre pour me garantir de cette mitraille qui faisait tomber les branches sur moi ; j’en étais couvert. Je me voyais perdu.

Heureusement, toute la division avance par bataillon. Je me relevai et me trouvai dans une compagnie du bataillon, j’y restai toute la journée, car il ne restait plus que quatorze de nos grenadiers sur cent soixante-quatorze, le reste fut tué ou blessé. Nous fûmes obligés de venir reprendre notre première position, criblés par la mitraille. Tout tombait sur nous qui tenions la gauche de l’armée, contre la grande route d’Alexandrie, et nous avions la position la plus