Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/147

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

je le voie ? Ah ! c’est vous, Coignet ? — Oui, mon capitaine. — Je vous croyais au rang des morts, je vous avais vu tomber dans le fossé. — Ils m’ont donné un fameux coup de sabre ; tenez, voyez ! ils m’ont coupé ma queue. — Allons ! tâtez dans mon sac, prenez mon sauve-la-vie[1] et vous boirez un coup de rhum pour vous remettre ; ce soir, si nous y sommes, je viendrai vous chercher. — Me voilà sauvé pour la journée, mon capitaine, je vais joliment me battre. »

L’autre capitaine dit : « J’ai voulu le mettre en serre-file ; il n’a pas voulu. — Je le crois, il m’a sauvé la vie à Montebello. »

Ils me prirent la main. Que c’est donc beau la reconnaissance ! j’en sentirai le prix toute ma vie.

En attendant, nous avions beau faire, nous baissions l’oreille. Il était deux heures ; « la bataille est comme perdue », dirent nos officiers, lorsqu’arrive un aide de camp ventre à terre, qui crie : « Où est le premier Consul ? Voilà la réserve qui arrive, du courage ! vous allez avoir du renfort de suite, dans une demi-heure. » Et voilà le Consul qui arrive : « Tenez ferme ! dit-il en passant, voilà ma réserve ! » Nos pauvres petits pelotons regardaient du côté de la route de Montebello, à tous les demi-tours que l’on nous faisait faire.

Enfin cris de joie : « Les voilà ! les voilà ! »

  1. Flacon.