Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/380

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Le roi de Naples se porta sur Vilna ; il y arriva le 8 décembre, et nous le 10, avec la garde. Nous arrivâmes le soir aux portes de la ville barricadées avec de fortes pièces de bois ; il fallut des efforts inouïs pour pénétrer. Je me trouvais avec mon camarade dans un collège bien chauffé. Quand je fus trouver mon général pour prendre ses ordres : « Tenez-vous prêt à quatre heures du matin pour sortir de la ville, dit-il, car l’ennemi arrive sur la hauteur et nous serons bombardés au jour. Ne perdez pas de temps. » Rentré dans mon logement, je me prépare pour partir ; je réveille mon camarade qui n’entendait pas de cette oreille ; il était dégelé et préférait rester au pouvoir de l’ennemi ; à trois heures, je lui dis : « Partons ! — Non, dit-il, je reste. — Eh bien ! je te tue, si tu ne me suis pas. — Eh bien ! tue-moi ! »

Je tire mon sabre, et lui en applique de forts coups en le forçant à me suivre. Je l’aimais, ce brave camarade, je ne voulais pas le laisser à l’ennemi. Nous fûmes prêts à partir au moment où les Russes forcèrent la porte de Vitepsk ; nous n’eûmes que le temps de sortir. Ils commirent des horreurs dans la ville, tous ces malheureux couchés dans leurs logements furent égorgés ; les rues étaient encombrées de cadavres français. Là les juifs furent les bourreaux de nos Français. Heureusement que l’intrépide Ney arrêta le désordre. Les ailes droite et gauche de