Page:Collectif (famille Chauviteau) - 1797-1817 Lettres de famille retrouvées en 1897, 1897.djvu/229

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même ses comptes avec une régularité parfaite ; elle faisait à ses enfants une avance douairière et arrivait par sa prudente économie à rétablir en peu de temps le capital engagé ; elle entrait dans les moindres détails du ménage, comptait elle-même avec sa blanchisseuse et veillait à l’entretien soigneux du linge et du mobilier ; elle travaillait vite et adroitement ; elle avait un ordre admirable dans toutes ses affaires, dans ses tiroirs, ses armoires, ses moindres boîtes, ce qui lui permettait de nous désigner la place de chaque objet et de se le faire apporter pour ainsi dire à tâtons. Les papiers, les lettres et factures étaient aussi classés avec soin dans des petits paquets qu’elle attachait elle-même ; sa propreté était exquise et entrait beaucoup dans son hygiène ; sa mise simple et de bon goût en était agréablement rehaussée et paraissait d’une plaisance inimitable ; elle avait ses formes à elle qui lui allaient à merveille et qu’on aimait à lui voir conserver en dépit de la mode. Vêtue habituellement de soie noire, elle avait toujours des collerettes et manchettes de dentelles d’une exquise propreté et de petits bonnets fort simples, mais toujours garnis de fraîche blonde.

Malgré les rides de l’âge, elle avait le teint clair et frais ; elle avait conservé en partie ses cheveux qu’elle entretenait avec soin et dont elle formait ces petites boucles soyeuses dont nous étions tous fiers. Elle était, je puis le dire, une grand’mère charmante, je dirais même séduisante, et chaque année qui la marquait de son sceau nous la rendait plus chère. Ce que cette incomparable grand’mère fut pour nous, nous pouvons dire dans une certaine mesure qu’elle le fut pour ses domestiques ; elle en était aimée, et il était facile de voir que ce que l’on faisait pour elle, ou le faisait avec le cœur. Elle était très vive et voulait être obéie sans réplique ; mais jamais elle ne commandait avec hauteur et cherchait toujours à ménager la peine de ses domestiques ; étaient-ils malades, elle les soignait comme ses enfants. On la vit les envoyer, convalescents, se promener dans sa voiture.

Lorsqu’elle habitait rue du Mont-Blanc, en 1825, elle était descendue à la loge soigner la petite fille du concierge, qui mourait presque dans ses bras. La mère s’attacha à elle pour la vie. Entrée peu après au service d’Hermet et de Séraphine, Mme Mau-