Page:Comeau - La vie et le sport sur la Côte Nord du Bas Saint-Laurent et du Golfe, 1945.djvu/186

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Perdu dans la forêt



Pour les gens non habitués, je crois qu’il n’y a rien de plus effrayant que de s’égarer dans le bois. Ceci s’applique surtout à notre section de la province où il n’y a qu’un seul chemin sûr à suivre. Dans d’autres parties du pays, supposons qu’une personne s’écarte, il y a toujours chance pour elle, si elle prend une fausse direction, d’arriver à quelque camp de bûcherons, une voie ferrée, ou un bourg quelconque.

Tandis que, sur la Côte Nord, il n’y a qu’un seul espoir de s’orienter vers un lieu sûr, savoir, la ligne de la côte. Tous les autres points de repère conduisent à la forêt, où l’on peut marcher pendant des centaines de milles sans rencontrer l’ombre d’un être humain.

Le meilleur coureur de bois et trappeur et même les Indiens qui naissent et grandissent dans la forêt, s’y écarteront eux-mêmes pendant quelque temps, mais grâce à leur expérience, ils n’éprouvent jamais les terreurs qui assailliront le novice en pareilles occurrences.

Le Sauvage constatera qu’il s’est égaré, et, si c’est dû à une tempête de neige ou à l’obscurité, il s’arrêtera, fera du feu, prendra une bouchée, agira de bon jugement, et lorsque le temps se refera, il retrouvera parfaitement son chemin.

J’ai fait moi-même cette expérience. Quand la chose m’arriva pour la première fois, je n’avais que dix ans. Nous demeurions alors à Mingan. J’étais dans l’habitude de courir ici et là dans le bois, de tendre des collets aux lièvres, de petites trappes, et, à l’occasion, de tirer des perdrix.

Une après-midi, je partis, comme à l’ordinaire, et, après avoir visité mes collets j’allais m’en retourner