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PERDU DANS LA FORÊT

cette année-là, devait être à la tête de la rivière de la Trinité, nous rendant jusqu’au bras droit de la Manicouagan, environ cent quatre-vingt milles de distance. Notre bagage pesait à peu près six cents livres, sans compter le canot. La plus grande partie de ce fourniment devait servir à des caches pour l’hiver. Le tout était divisé et empaqueté en sacs formant huit charges avec le canot, soit quatre voyages pour chacun de nous, dans chaque portage. On ne pouvait que progresser lentement de cette façon, aussi n’arrivions-nous à faire qu’une moyenne de six milles par jour.

William supporta passablement bien ce dur trajet. Il était jeune et vigoureux, et commençait à prendre goût à sa nouvelle existence. Nous faisions aussi un peu de pêche et de chasse, ce qui l’intéressait beaucoup, et, si ce n’eût été de la peur qu’il avait des Indiens, il aurait été parfaitement heureux. Il me suivait partout sur les talons, et ne pouvait rester cinq minutes seul, le soir, dans nos camps. Il avait coutume de s’y glisser jusqu’au fond, de façon à se trouver derrière moi.

Le neuvième jour, nous étions rendus aux fourches de la rivière Trinité. Ici nous avions un long portage d’une longueur de quatre milles à faire. Nous y avions aussi un camp, où nous devions laisser une partie de nos effets. De plus, c’était un de nos endroits de pêche et nous y fîmes sécher de la truite pour nos appâts.

C’était alors vers le commencement d’octobre, au début de la chute des feuilles, mais la brousse était encore épaisse.

Pas plus souvent fréquenté qu’il était, le portage que nous avions à parcourir ce matin-là, se trouvait rempli d’aulnes et autres arbustes. Je portais comme toujours le canot ; je craignais de le confier à William,