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COMMERCE DU PAPYRUS EN GAULE

de celle de « tomus ». Comme il est impossible de lui donner ici le sens de livre, force est bien d’y voir l’indication d’une quantité connue et traditionnelle dans le commerce du papyrus, analogue à ce qu’est de nos jours la rame dans le commerce du papier[1].

De la charte de Corbie nous pouvons donc déduire avec certitude que l’on pouvait se procurer du papyrus « en gros » dans l’entrepôt royal de Marseille jusqu’au commencement du viiie siècle[2]. Nous en conclurons aussi que l’on en consommait de très grandes quantités. Car enfin l’emploi de cinquante rames de papier par an suffirait même de nos jours à l’activité d’un bureau d’affaires ou d’administration. Si nous considérons les achats de Corbie comme une moyenne, nous serons donc forcés d’admettre que les monastères de la Gaule mérovingienne à eux seuls absorbaient une masse considérable de papyrus. Et il faut y ajouter la masse certainement beaucoup plus considérable encore que requéraient les besoins de l’organisation civile, de l’organisation ecclésiastique, ceux du commerce et de la correspondance des particuliers.

Le privilège dont les moines de Corbie jouissaient pour leur ravitaillement en papyrus appartenait sans doute aussi à d’autres abbayes. Mais il va de soi que le commerce

    kunden der Karolinger, t. I, p. 288 ont traduit carta par parchemin. Mais on ne peut hésiter, avec M. Levillain, op. cit., p. 68, no 3, à rendre ici ce mot par papyrus, non seulement parce que carta et papyrus sont synonymes encore à cette époque, mais surtout parce qu’il s’agit de Marseille et que nous savons par Grégoire de Tours, Hist. Franc., V, 5, que le papyrus était avec l’huile et les épices un des principaux articles du commerce de ce port.

  1. M. Levillain, op. cit., p. 69 et 198, traduit tomus par « main ». On peut évidemment hésiter entre la main et la rame qui, comme on sait, indique une quantité plus considérable.
  2. Cet entrepôt est désigné dans le diplôme sous le nom de cellarius. Il faut peut-être voir dans ce mot un synonyme de catabolus, expression que d’autres diplômes relatifs au port de Marseille emploient avec le sens divers de quai et d’entrepôt. Voy. F. Vercauteren, Cataplus et catabolus. Bulletin Ducange, 1926, p. 98 et suiv.