Page:Conan - Angéline de Montbrun, 1919.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ma chère Mina, voici mon dernier automne dans le monde, et vous ne sauriez croire quel charme touchant cette pensée répand sur tout ce que je vois. C’est comme si j’allais mourir.

Jamais la nature ne m’a paru si belle. Je me promène beaucoup seule, avec mes pensées, et je ne sais quelle sérénité douce, qui ne me quitte plus. Déjà on sent l’automne. Mais dans notre état présent, je crois qu’il vaut mieux marcher sur les feuilles sèches que sur l’herbe fraîche.

En attendant qu’il en neige, j’ai ici un endroit qui fait mes délices. C’est tout simplement un enfoncement au bord de la mer ; mais d’énormes rochers le surplombent et semblent toujours prêts à s’écrouler, ce qui m’inspire une crainte folle mêlée de charme.

Malgré la distance et le sentier âpre, caillouteux, j’y vais souvent. J’aime cette solitude parfaite et sauvage, où l’on n’entend que le cri des goélands et le bruit de la mer. Là, pas un arbuste, pas une plante : seulement quelques mousses entre les fentes