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PHYSIONOMIES DE SAINTS

que rien n’interrompait le chant d’amour qui s’élevait de son cœur vers le Roi des fleurs.

Arrivée en France, la princesse déclara qu’il lui fallait se rendre à Assise.

Un chevalier français se fit son guide et la conduisit jusqu’au monastère des Clarisses.

« Je viens servir le Maître des fleurs, dit la belle étrangère en frappant à la porte ».

La porte aussitôt s’ouvrit et la fille du calife pénétra dans le cloître.

Grande fut la surprise des religieuses en l’apercevant, grande fut aussi leur joie en écoutant sa pure et merveilleuse histoire.

Habituée aux splendeurs féeriques du palais de son père, la princesse regardait autour d’elle avec un étonnement profond. L’habit pauvre et grossier des religieuses, le rudimentaire mobilier, les murs frustes et nus contrastaient si étrangement avec ce qu’elle avait rêvé.

« — Je demande et je prie qu’on me conduise sans retard aux jardins du Sultan des fleurs, dit-elle aux religieuses.

Celles-ci sourirent et la supérieure répondit :

» — Ma fille, le Seigneur vous a parlé au figuré ; vous n’avez point compris le sens de ses paroles. Les fleurs qu’il vous envoie cultiver, ce sont les vertus : la pureté, l’humilité, la charité, la très sainte et très haute pauvreté… Laissez-nous vous instruire, laissez-nous vous préparer au saint baptême… Celui qui vous a attirée de la terre lointaine ne vous a point trompée. Il vous a vraiment aimée jusqu’à la mort. Laissez-nous vous dire ce qu’il a souffert, Lui le Seigneur de gloire, Lui l’infinie Beauté ».

Et, à la jeune musulmane, la sainte religieuse fit le récit des humiliations et des souffrances de Jésus-Christ.

Ce récit, auquel nous donnons le nom tendre et douloureux de Passion, nous l’écoutons peut-être sans être touchés, mais comment dire ce qu’il produisit dans le cœur déjà enivré de la jeune fille ? La parole n’ex-