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PHYSIONOMIES DE SAINTS

Mais dénouant sa cordelière, le saint la présenta au taureau qui devint doux comme un mouton et se laissa paisiblement museler.

Plusieurs fois on vit les bêtes les plus farouches plier les genoux devant le Père Solano et lui lécher doucement les mains.

Quand les sauterelles s’abattaient sur les moissons de ses chers Indiens, il leur ordonnait de s’envoler. Toutes obéissaient, et l’on voyait ces légions d’insectes se diriger vers l’endroit de la montagne que le saint indiquait du doigt.

Les oiseaux voltigeaient autour de lui en gazouillant joyeusement ; ils se posaient sur ses épaules, sur ses bras, mangeaient dans ses mains et se laissaient caresser.

François d’Assise aimait à voir en ses enfants les musiciens de Dieu, et aucun n’a mieux que le P. Solano réalisé cet idéal. Une atmosphère de poésie et de joie enveloppe son apostolat. Tout lui chantait l’amour infini, tout l’élevait jusqu’à l’éternelle Beauté. Exténué de fatigue, dévoré par la faim, accablé de chaleur, transi de froid, il chantait. Un ange du ciel n’aurait pas désavoué la douceur de sa voix, et à celui qui se sacrifiait avec une générosité si parfaite, Dieu ne savait rien refuser.

François Solano fut l’un des plus grands thaumaturges que le monde ait vus. Sa vie apostolique est une suite de merveilles. Aujourd’hui encore, on peut voir, à Talavera, une source abondante que le saint fit jaillir quand l’eau manquait partout.

Aucune parole ne saurait donner l’idée de la vénération des Indiens pour leur apôtre. Mais après quatorze ans de travaux prodigieux, le P. Solano dut s’arracher à ses chers enfants. L’obéissance le rappela à Lima. Dans la ville orgueilleuse, il prêcha la pénitence, menaçant les pécheurs de la justice de Dieu. Et tel était le prestige de sa sainteté que sa voix fut entendue. Dans la cité d’or, l’épouvante se répandit