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Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/92

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idées a ses inconvéniens, comme ses avantages. Pour les faire appercevoir sensiblement, je suppose deux hommes ; l’un, chez qui les idées n’ont jamais pu se lier ; l’autre, chez qui elles se lient avec tant de facilité & tant de force, qu’il n’est plus le maître de les séparer. Le premier seroit sans imagination & sans mémoire ; & n’auroit, par conséquent, l’exercice d’aucune des opérations que celles-ci doivent produire. Il seroit absolument incapable de réflexion ; ce seroit un imbécille. Le second auroit trop de mémoire & trop d’imagination ; & cet excès produiroit presque le même effet qu’une entière privation de l’une & de l’autre. Il auroit à peine l’exercice de sa réflexion ; ce seroit un fou. Les idées les plus disparates étant fortement liées dans son esprit, par la seule raison qu’elles se sont présentées ensemble, il les jugeroit naturellement liées entr’elles, & les mettroit les unes à la suite des autres, comme de justes conséquences.