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CORRESPONDANCE GÉNÉRALE.


de gloire il était jaloux, de quelle espèce d’ambition il pouvait être susceptible, il m’est impossible de sacrifier mon opinion à celle de gens qui, pendant que nous discutions les moyens d’arriver à la liberté, passaient leur vie à solliciter des places. J’estime beaucoup tous ceux qui, avant la révolution, ont, comme M. de La Mettrie, prouvé qu’ils aimaient la liberté ; quant à ceux dont la passion date de l’année passée, qui soutenaient, il y a un an, les opinions qu’ils reprochent aujourd’hui comme des crimes, j’avoue qu’il m’est impossible de ne pas ni’en défier, de ne pas voir en eux des gens destinés à être toujours du parti qui leur offre le plus d’avantage. J’avoue encore que je ne puis estimer ceux des amis de la liberté qui, liés avec les planteurs, ou planteurs eux-mêmes, votent pour la conservation de la traite, et font refuser la parole aux gens qui défendent la cause de l’humanité ; non plus que ceux qui veulent que les assemblées primaires soient permanentes à Paris, et ne le soient pas dans le reste de l’empire. Je me défie encore plus de ceux qui se plaisent dans le trouble, qui applaudissent aux violences qui cherchent à multiplier le nombre des mécontents par des rigueurs plus nuisibles qu’utiles. Les hommes qui ont des lumières et des talents n’ont pas besoin de tous ces moyens pour être quelque chose ; ceux qui ont de l’humanité, de véritables vertus, ne voudraient pas les employer.

Voilà ma profession de foi. Est-ce là ce que vous appelez être un vrai jacobin ?