Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/234

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il serait dangereux de conserver l’esprit d’inégalité dans les femmes, ce qui empêcherait de le détruire dans les hommes.

Le danger serait beaucoup plus grand si, tandis qu’une éducation commune accoutumerait les enfants d’un sexe à se regarder comme égaux, l’impossibilité d’en établir une semblable pour ceux de l’autre les abandonnait à une éducation solitaire et domestique ; l’esprit d’inégalité qui se conserverait alors dans un sexe s’étendrait bientôt sur tous deux, et il en résulterait ce que nous avons vu arriver jusqu’ici de l’égalité qu’on trouve dans nos collèges, et qui disparaît pour jamais au moment même où l’écolier croit devenir un homme.

La réunion des deux sexes dans les mêmes écoles est favorable à l’émulation, et en fait naître une qui a pour principe des sentiments de bienveillance, et non des sentiments personnels, comme l’émulation des collèges.

Quelques personnes pourraient craindre que l’instruction nécessairement prolongée au-delà de l’enfance ne soit écoutée avec trop de distraction par des êtres occupés d’intérêts plus vifs et plus touchants : mais cette crainte est peu fondée. Si ces distractions sont un mal, il sera plus que compensé par l’émulation qu’inspirera le désir de mériter l’estime de la personne aimée, ou d’obtenir celle de sa famille. Une telle émulation serait plus généralement utile