Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/292

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d’un principe, même purement politique en apparence, l’utilité et la possibilité d’une opération d’économie publique, on a besoin d’avoir une idée de ces méthodes, tandis que l’ignorance d’une proposition très simple, ou le peu d’habitude d’employer le calcul, ont souvent arrêté dans leur marche des hommes d’ailleurs très éclairés. Alors on sentira toute l’utilité de faire entrer cette science dans l’instruction commune.

D’ailleurs, en supposant que l’on puisse séparer les principes politiques de ceux du calcul, et que les hommes qui exercent les fonctions publiques trouvent moyen d’y suppléer par des secours étrangers, il n’en résultera pas moins qu’alors même une grande partie des vérités et des opérations qui influent le plus sur le bonheur des hommes, seront pour eux une espèce de mystère, et qu’ils seront forcés de choisir entre la défiance stupide de l’ignorance et une confiance aveugle. Ils resteront toujours exposés à être trompés, soit qu’ils s’abandonnent à suivre une route qu’ils ne connaissent pas, soit qu’ils refusent de s’y engager. On ne prétend point ici que tous doivent être en état de faire eux-mêmes toutes ces opérations, ou même de connaître les méthodes mathématiques qui y servent de guide : mais il faut que du moins ils entendent les principes sur lesquels ces méthodes sont fondées ; qu’ils sachent pourquoi elles ne trompent point ; à quel degré de précision elles conduisent, et quelle est la probabilité des résultats réels et pratiques auxquels on est amené par elles.