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sur l’esclavage des Negres

dont un affranchiſſement général pourroit être ſuivi.

6.o On ne peut diſſimuler que les Negres n’aient en général une grande ſtupidité : ce n’eſt pas à eux que nous en faiſons le reproche, c’eſt à leurs maîtres. Ils ſont baptiſés, mais dans les colonies romaines on ne les inſtruit point du peu de morale que renferment les catéchiſmes vulgaires de cette égliſe. Ils ſont également négligés par nos miniſtres. On ſent bien que les maîtres n’ont eu garde de ſ’occuper de leur inſpirer une morale fondée sur la raiſon. Les relations de la nature ou n’exiſtent point, ou ſont corrompues dans les eſclaves. Les ſentimens naturels à l’homme, ou ne naiſſent point dans leur ame, ou ſont étouffés par l’oppreſſion. Avilis par les outrages de leurs maîtres, abattus par leur dureté, ils ſont encore corrompus par leur exemple. Ces hommes ſont-ils dignes qu’on leur confie le ſoin de leur bonheur & du gouvernement de leur famille ? ne ſont-ils pas dans le cas des infortunés, que des traitemens barbares ont, en partie, privés de la raiſon ; & dès lors, quelle que ſoit la cauſe qui les ait rendus incapables d’être hommes, ce que