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levé ſur ceux qui tenteroient de réunir la Nation. L’on doit être d’autant plus alarmé de ce ſyſtème, qu’il a préciſément pour appuis ceux qui, en 1976, déclaroient que le Peuple eſt corvéable & taillable de ſa nature ; qui ſoutenoient, l’année dernière, que les Loix faites dans les États Genéraux avoient beſoin d’un enregiſtrement libre, & que les Parlemens pouvoient exercer un pouvoir négatif contre la Nation réunie avec le Roi : opinion qu’ils ont abandonnée par l’impuiſſance de la ſoutenir, pour y ſubſtituer un ſyſtême moins révoltant, & par cela même plus dangereux.

La Nobleſſe s’eſt laiſſée entraîner à ce ſyſtême, parce qu’elle a cru que le Tiers-État annuellement aſſemblé, finiroit par la forcer de renoncer à ſon droit négatif. D’autres Citoyens de tous les Ordres y ont vu la facilité d’allier les fonctions de Repréſentans avec toutes les autres, l’avantage de remettre tous les trois ans, tous les cinq ans, la Nation dans un état de trouble & de diviſion, favorable à toutes les prétentions, à toutes les vues ambitieuſes.

Ainſi, d’un côté, les ſimples Citoyens, pour acquérir plus d’importance, pour s’aſſurer plus de places, ont cherché à rendre la Nobleſſe odieuſe & ſuſpecte, ont cherché à l’obliger de