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cun pays, des orages si violens et si répétés ne coûtèrent moins de sang, ne produisirent moins de crimes.

Il ne nous est resté aucun ouvrage des Romains sur la politique. Celui de Cicéron sur les lois, n’étoit vraisemblablement qu’un extrait embelli des livres des Grecs. Ce n’étoit pas au milieu des convulsions de la liberté expirante, que la science sociale auroit pu se naturaliser et se perfectionner. Sous le despotisme des Césars, l’étude n’en eût paru qu’une conspiration contre leur pouvoir. Rien enfin ne prouve mieux, combien elle fut toujours inconnue chez les Romains, que d’y voir l’exemple, unique jusqu’ici dans l’histoire, d’une succession non interrompue, depuis Nerva jusqu’à Marc-Aurèle, de cinq empereurs qui réunissoient les vertus, les talens, les lumières, l’amour de la gloire, le zèle du bien public, sans qu’il soit émané d’eux une seule institution qui ait marqué le désir de mettre des bornes au despotisme ou de prévenir les révolutions, et de resserrer par de nouveaux liens les parties de cette masse immense, dont tout présageoit la dissolution prochaine.