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de nos peintres est celui des Raphaël et des Carraches. Tous ses moyens, conservés dans les écoles, loin de se perdre, ont été plus répandus. Cependant, il s’est écoulé trop de temps sans produire de génie qui puisse lui être comparé, pour n’attribuer qu’au hasard cette longue stérilité. Ce n’est pas que les moyens de l’art ayent été épuisés, quoique les grands succès y soyent réellement devenus plus difficiles. Ce n’est pas que la nature nous ait refusé des organes aussi parfaits que ceux des Italiens du seizième siècle ; c’est uniquement aux changemens dans la politique, dans les mœurs, qu’il faut attribuer, non la décadence de l’art, mais la foiblesse de ses productions.

Les lettres cultivées en Italie avec moins de succès, mais sans y avoir dégénéré, ont fait, dans la langue françoise, des progrès qui lui ont mérité l’honneur de devenir, en quelque sorte, la langue universelle de l’Europe.

L’art tragique, entre les mains de Corneille, de Racine, de Voltaire, s’est élevé, par des progrès successifs, à une perfection