Page:Conférences inédites de l'Académie royale de peinture et de sculpture.djvu/120

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maîtres, n’est rien moins que commune, et celle du dessin est bien moins rare que la première. Ceux mêmes de la plus grande réputation, comme Michel-Ange, Jules Romain et plusieurs autres, n’ont eu, la plupart, qu’une certaine routine de teintes générales, toujours les mêmes et quelquefois même sauvages, triviales, sans vérité et sans variété. On a depuis vu des peintres, habiles d’ailleurs, lesquels ont suivi ces mauvais exemples trop autorisés, chez qui cette première habitude était si forte, qu’en travaillant même d’après nature, ils ne la voyaient plus qu’au travers de ce verre défectueux, et comme ils avaient pris mal à propos la coutume de la peindre. Cependant la vérité est la base de la peinture : rien n’est beau comme le vrai ; le vrai seul est en droit de plaire à tous, connaisseurs et autres ; il est le but de toutes les sciences, mais il doit briller éminemment dans l’art de peindre. Les autres arts ne font qu’en rappeler les idées ; mais la peinture le rend présent et ne tend pas à moins qu’à faire prendre son imitation pour la réalité même.

Il ne faut pas croire pourtant qu’il suffise d’imiter servilement le naturel tel que le hasard le présente. Comme il faut en dessinant faire un choix de belles formes, il en faut faire un des couleurs les plus favorables à l’imitation. C’est au bon goût à faire ce choix, et selon ce qui peut produire un