Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/348

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à la pointe de chaque goedendag que nous achevons. Et ne vous étonnez pas, noble comtesse, de me voir abattre ces arbres avec tant d’ardeur ; il me semble frapper l’ennemi, et cette trompeuse vengeance fait bondir mon cœur en lui donnant un intrépide élan.

Mathilde admirait le jeune homme dans le regard duquel étincelait le feu héroïque qui embrasait son cœur, et dont la physionomie, semblable à celle d’une divinité grecque, portait à la fois les indices de douces et généreuses émotions et de passions ardentes. La comtesse contemplait avec plaisir ces yeux où une virile fierté rayonnait sous de longs cils, et ces traits délicats qu’animait l’expression d’un dévouement absolu et de l’amour de la patrie.

— Maître Breydel, dit-elle avec un doux sourire, votre société me serait agréable, s’il vous plaisait de nous suivre.

Jean Breydel jeta sa hache, rejeta les boucles blondes de ses cheveux derrière les oreilles, plaça son bonnet avec plus d’élégance, et, plein d’orgueil, il suivit la jeune fille. Mathilde murmura à voix basse eu s’adressant à de Coninck :

— Si mon père avait à son service un millier d’hommes fidèles et intrépides comme lui, les Français ne demeureraient pas longtemps en Flandre.

— Il n’y a qu’un Flamand comme Breydel, répondit de Coninck. Il est rare que la nature place une âme aussi ardente dans un corps aussi puissant, et c’est une sage disposition de Dieu ; sans cela les