Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/379

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leurs compagnons. On entendait la voix de Châtillon qui encourageait les siens à la résistance ; on remarquait aussi messire de Mortenay, dont l’épée formidable scintillait comme un éclair dans les ténèbres.

Breydel, en proie à une rage insensée, frappait à droite et à gauche à coups redoublés de sa hache dans les rangs des Français : aussi était-il déjà à quelques pieds au-dessus du sol, tant était grand le nombre d’ennemis qu’il avait renversés à ses pieds. Des torrents de sang coulaient sous les cadavres, et le cri : « Flandre au Lion ! à mort ! à mort ! » se mêlait affreusement aux derniers gémissements des mourants. Messire de Gistel se trouvait aussi parmi les Français. Comme il savait que sa mort était infaillible si les Flamands avaient le dessus, il ne cessait de crier : « Vive la France ! vive la France ! » croyant encourager par là les soudards qui l’entouraient. Mais Jean Breydel reconnut sa voix :

— À moi, mes hommes ! s’écria-t-il avec fureur, il me faut la vie de ce traître et félon ! En avant ! il y a assez longtemps que cela dure… Qui m’aime me suive !

À ces mots, il s’élança, la hache à la main, au milieu des Français, et abattit, en un instant, tous ceux qui l’entouraient ; à cette vue, ses compagnons tombèrent sur l’ennemi avec tant d’acharnement, en le refoulant contre le mur, qu’ils mirent à mort plus de cinq cents hommes. En ce moment suprême, à cette heure de mort, de Mortenay se rappela les paroles