Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/447

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l’entretien sur un autre sujet. Tout à coup l’attention générale fut attirée par un bruit imprévu ; on eût dit que deux hommes luttaient à quelques pas de la tente. Tous se levèrent pour aller voir ce que ce pouvait être, mais avant que personne eût eu le temps de sortir de la tente, entra un boucher placé en sentinelle avec autre personnage qu’il attirait violemment à l’intérieur :

— Maître, dit-il en poussant l’étranger dans la tente, j’ai trouvé ce ménestrel derrière le camp ; il allait écouter à toutes les tentes et se glissait à pas de loup dans les ténèbres : pendant longtemps je l’ai suivi et épié. Il y a sans doute quelque trahison là-dessous, car voyez comme le coquin tremble.

L’homme qu’il avait introduit dans la tente était vêtu d’un pourpoint bleu, et portait sur la tête un chaperon orné d’une plume. Une longue barbe couvrait la moitié de son visage. De la main gauche il tenait un petit instrument à cordes qui ressemblait assez à une harpe et semblait vouloir en jouer un air. Il tremblait de peur et il était d’une pâleur telle qu’on eût dit que la vie allait l’abandonner ; il était visible qu’il voulait éviter le regard de Jean Breydel ; car il tournait la tête d’un autre côté pour que le doyen ne vît point ses traits.

— Que viens-tu faire dans le camp ? s’écria Breydel ; pourquoi es-tu aux écoutes autour des tentes ? Réponds !… vite !

Le ménestrel répondit dans une langue qui res-