Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/471

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gnons le camp, j’y veux boire du vin avec vous, comme jadis ; je vous en donne à chacun une mesure. Vive le Lion de Flandre !

Ce cri fut répété par tous les compagnons ; il se mit quelque désordre dans les rangs, et ils voulurent gagner le camp à la débandade : la promesse du doyen les avait mis en joie.

— Halte ! halte ! s’écria Breydel, pas ainsi : chacun à son rang, ou nous nous fâcherons !

Les autres troupes étaient déjà en mouvement et se dirigeaient vers les retranchements, trompettes sonnantes et bannières déployées ; le cortége du comte franchit la porte de la ville et disparut derrière les remparts.

Quelque temps après, les Flamands, devant leurs tentes, s’entretenaient de l’anoblissement des doyens. Un grand nombre de bouchers étaient assis à terre en un vaste cercle, le hanap à la main ; de grandes cruches pleines de vin se trouvaient non loin d’eux : ils chantaient à l’unisson le chant du Lion de Flandre. Au milieu d’eux, sur une tonne vide, était assis Breydel qui entonnait chaque couplet le premier ; il buvait à coups redoublés à la délivrance de la patrie, et s’efforçait, par une plus grande familiarité avec ses hommes, de leur faire oublier son changement de condition ; car il craignait qu’ils ne pussent penser qu’il ne voulait plus être comme autrefois leur ami et leur camarade.

De Coninck s’était renfermé dans sa tente pour