Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/473

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riches étendards et à leurs bannières brodées ; tandis qu’on n’y apercevait que tentes et pavillons de velours de toutes couleurs, on ne rencontrait dans l’autre partie que d’humbles huttes recouvertes de toile ou de paille. On eût pu s’étonner, à bon droit, qu’une armée aussi nombreuse ne souffrît pas de la faim, puisqu’à cette époque il était rare que les troupes en campagne emportassent avec elles quelques provisions ; cependant il s’y trouvait de tout en abondance : on y voyait le froment amoncelé dans la boue, et les meilleurs vivres y étaient foulés aux pieds. Les Français mettaient en œuvre un bon moyen de se procurer tout ce dont ils avaient besoin, et, en même temps, de se rendre odieux aux Flamands ; à chaque instant, de nombreuses bandes de soudards sortaient des retranchements pour parcourir les alentours, enlevant, pillant ou détruisant tout ce qu’ils rencontraient sur leur passage ; ils avaient parfaitement compris les intentions de leur chef Robert d’Artois, et, pour les remplir, ils com mettaient les crimes les plus affreux qui se puissent commettre en temps de guerre. Comme emblème de la dévastation dent ils menaçaient la Flandre, tous avaient suspendu à leurs lances de petits balais, voulant faire connaître par là qu’ils venaient balayer et nettoyer le pays de Flandre. Ils n’épargnaient rien, en effet, pour remplir leur promesse : en peu de jours il ne resta debout, dans la partie méridionale du pays, ni une maison, ni une église, ni un château,