Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/523

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voulait pas vivre plus longtemps. Il fit de la main un signe, comme pour adresser un suprême adieu à Jean Borlunt, et soudain étendit morts deux Gantois. Enfin, frappé à la tête d’un coup de massue, il tomba sans vie sur les corps amoncelés de ses frères d’armes. Beaucoup d’autres chevaliers, tombés de cheval, voulurent rendre les armes, mais on ne les écouta point ; pas un seul Français ne sortit du cercle fatal qui les enfermait.

Pendant que les hommes de messire Borlunt accomplissaient cette œuvre d’extermination, la lutte était aussi vive sur toute la ligne de bataille. Là on entendait le cri : « Noël ! Noël ! Montjoie, Saint-Denis ! » de quoi on pouvait conclure que, sur ce point, les Français avaient l’avantage ; ailleurs montait vers le ciel le formidable cri : « Flandre au Lion ! » signal de la défaite d’un corps français.

Le ruisseau de Groningue était rougi par le sang et rempli de cadavres. Les cris suprêmes des mourants étaient couverts par le bruit des armes entrechoquées ; un bruit sourd et lugubre, comme un grondement de tonnerre, planait au dessus des combattants. Lances et masses d’armes volaient en pièces : un long amas de cadavres formait comme une digue en avant de la ligne de bataille. Les blesser, étaient sûrs de périr, car on ne relevait personne, et ils étaient condamnés à être étouffés dans la fange ou foulés sous les pieds des chevaux.

Sur ces entrefaites, Hugues d’Arckel, avec ses huit