Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/538

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Neuf heures sonnaient au beffroi de Courtray lorsque la cavalerie de Raoul de Nesle et du sire de Châtillon battit en retraite et se replia sur les troupes du comte d’Artois. En apprenant la défaite des siens, Robert fut transporté d’une rage aveugle et voulut courir sus à l’armée flamande avec le corps nombreux qu’il avait sous ses ordres. D’autres chevaliers s’efforcèrent de le faire renoncer à son imprudent dessein, en alléguant que les chevaux ne pouvaient s’aventurer sur le terrain où était engagée la bataille ; mais il ne voulut écouter personne et s’élança, suivi de tous ses hommes, à travers la foule des fuyards. Les cavaliers qui avaient échappé à la première déroute furent refoulés par le sénéchal et sa troupe, et s’enfuirent en désordre de toutes parts pour sortir de l’affreuse mêlée ; mais cela leur fut impossible : les premiers rangs furent repoussés en avant par ceux qui les suivaient, et les troupes fraîches tombèrent, avec la plus grande témérité, sur l’armée flamande. Au premier choc, les troupes de Guy furent forcées de reculer jusqu’en arrière du ruisseau de Groningue, mais là, les chevaux abattus leur servirent de boulevard et elles se trouvèrent comme à l’abri d’un retranchement.

Les cavaliers français ne purent tenir sur le sol fangeux ; ils s’abattirent les uns sur les autres, et un grand nombre d’entre eux périrent foulés aux pieds et écrasés par les autres. À cette vue, monseigneur d’Artois, transporté de fureur, s’élança au delà du