Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/565

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pouvais espérer ; je n’osais en demander autant à Dieu dans mes prières !

— Écoute-moi, mon enfant, et ne t’afflige pas, je t’en prie, de ce que je vais te dire : je dois, dès aujourd’hui, te quitter de nouveau. Le généreux guerrier qui, cette fois encore, m’a rendu à la liberté a reçu ma parole d’honneur que je regagnerais ma prison, dès que la bataille serait terminée.

La jeune fille pencha la tête sur la poitrine et, d’une voix pleine d’une profonde tristesse :

— Ils vous feront mourir, ô mon malheureux père !

— Ne t’alarme donc pas ainsi, Mathilde, reprit Robert ; mon frère Guy a fait prisonniers soixante chevaliers français de noble race ; on fera savoir à Philippe le Bel que leur vie répond de la mienne, et il est impossible qu’il sacrifie au désir de se venger les seuls braves qui aient échappé à la mort. Je n’ai plus rien à craindre, la Flandre est plus forte que la France ; je t’en prie donc, ne pleure pas. Réjouis-toi, au contraire, car le plus bel avenir nous attend ; je ferai restaurer le château de Wynendael qui nous recevra tous comme autrefois… Alors nous reprendrons les chasses au faucon… Comprends-tu combien nous serons heureux ?…

Un sourire d’inexprimable bonheur et le plus doux baiser furent la réponse de Mathilde. Mais, tout à coup, il sembla qu’une pensée douloureuse s’emparait de son âme ; sa physionomie prit une expression