Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/6

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confus des autres chantres de la forêt faisait taire ses accents mélodieux.

Au moment où commence notre récit, ces chevaliers traversaient un bois touffu. Le cliquetis des armes, et le pas retentissant des chevaux, en troublaient seuls la tranquillité. De temps en temps un cerf, effrayé dans sa retraite, s’élançait du taillis et fuyait, plus rapide que le vent, devant le danger qu’il pressentait.

À voir les costumes et les armes splendides de ces chevaliers, il était permis de supposer qu’ils étaient pour le moins barons ou comtes ; on pouvait les prendre même pour des seigneurs du plus haut rang. Un pourpoint de soie[1] tombait de leurs épaules en plis ondoyants, et un casque argenté, surmonté de plumes couleur pourpre et azur, couvrait leurs têtes. Les écailles d’acier de leurs gantelets, et les mailles d’or de leurs genouillères, étincelaient sous les feux du matin ; les destriers, pleins d’ardeur et blancs d’écume, que leurs maîtres retenaient avec peine, faisaient, par leurs brusques mouvements, scintiller l’argent et la soie de leurs riches harnais.

Si les voyageurs ne portaient pas leurs armures de guerre, ils s’étaient, néanmoins, mis en garde contre toute surprise ou agression ennemie. Leurs bras

  1. Les chevaliers portaient ce vêtement par-dessus la cuirasse. Il ne descendait que jusqu’aux genoux, n’avait pas de manches, et était fait d’étoffe de soie ou bien de cuir rehaussé d’or. Les armoiries et les devises des chevaliers étaient brodées sur la poitrine.